L’édito du mois de novembre

Soif de fraternité, de paix, de sainteté

Assis sur le rebord du monde

Il ne se passe pas une journée sans que les médias ne fassent état de scènes de violence et de cruauté. Combien de fois on se demande : Pourquoi ? Pourquoi tant de violence ? Comment l’enrayer ? L’auteur compositeur interprète Francis Cabrel, dans sa chanson « Assis sur le rebord du monde … » évoque ce triste portrait de notre monde : « Je vais aller m’asseoir sur le rebord du monde… Voir ce que les hommes en ont fait… Dieu qui s’est assis sur le rebord du monde… Et qui pleure de le voir tel qu’il est ! »

Penser global, agir local

Un slogan très à la mode dit : « Penser au niveau mondial, agir au niveau local». Quoi faire, nous ici ? Comment faire naître la sécurité, la liberté, le respect ? Spontanément, on peut dire : Prier ! Et c’est très important de le faire. En même temps, on aimerait pouvoir passer de la prière aux actes. Mais comment ? Par l’écoute du plus proche, l’accueil des différences individuelles, la compassion devant la désespérance des uns, la solitude des autres, le pardon, etc.

Imaginons un monde où chacun(e) poserait sa petite pierre dans la construction d’un univers habitable pour tous. Imaginons une ville, un village, un pays pleinement respectueux des cultures et des différences individuelles… Imaginons nos mains réunies pour tisser une toile de communion, de liberté, de partage, de miséricorde… Imaginons la force de communion qui pourrait rayonner à travers nous et traverser les frontières.

« La fraternité est une dimension essentielle de l’homme, qui est un être relationnel. La vive conscience d’être en relation nous amène à voir et à traiter chaque personne comme une vraie sœur et un vrai frère ; sans cela, la construction d’une société juste, d’une paix solide et durable devient impossible.» (Extrait du message du Pape François pour la Journée Mondiale de la Paix, 1er janvier 2014).

La paix entre les religions

Les plus hauts dirigeants politiques de notre pays seraient bien inspirés de s’abstenir de défendre le droit à blasphémer en France sous couvert de préserver la liberté d’expression. Celle-ci n’est-elle pas la possibilité d’exprimer ses opinions en respectant celles des autres. Où donc est le respect quand on blesse profondément autrui dans sa croyance ou dans sa foi ?

Le dialogue interreligieux, tant condamné par les intégristes de tous bords, est un indispensable ferment de paix depuis bien longtemps. Le pape saint Grégoire VII, en 1076, écrivait à un prince musulman d’Afrique du nord : «Nous croyons et nous confessons un seul Dieu, même si nous le faisons de manières diverses, chaque jour le louant et le vénérant comme créateur des siècles et souverain de ce monde ». Aussi, est-il inspirant de constater qu’au Moyen-âge des chrétiens ont voulu établir des relations harmonieuses avec d’autres religions, en particulier avec l’Islam.

D’ailleurs, en 1219 dans le cadre de la cinquième croisade, Saint François d’Assise décida de se rendre à Damiette (Tamiathis) en Égypte afin de rencontrer le sultan de Babylone Malik al-Kâmil. À la faveur d’une trêve, il gagna le camp des musulmans. Et finalement, il fut reçu avec bienveillance.
Il était dans l’idée de le voir convertir vers la religion chrétienne, mais en même temps il y avait dans sa démarche une volonté de réconciliation et de paix. Nous pouvons appliquer à notre temps les leçons de cette rencontre profonde, pleine d’humanité.

En hébreu, la paix se dit : Shalom.

Par ce mot, on désigne une plénitude et une harmonie dans une communion profonde. Si nous avons compris que la paix est don de Dieu, pouvons-nous la bâtir ? Ne devons-nous pas plutôt la demander comme une grâce ? Certes, mais l’un n’empêche pas l’autre.

La paix est une longue marche qui parfois dure toute la vie. Elle a un trait commun avec les autres béatitudes présentées dans l’évangile selon Saint Mathieu (5, 1-12). En apprentissage toute notre vie ; de chute en chute, de relèvement en relèvement, d’essai en réussite, on approche imperceptiblement de l’esprit de pauvreté, de la douceur, de la non-violence, de la sainteté, de la miséricorde. Elle est un fruit de l’Esprit Saint, le démon apporte la zizanie.

Père Jean-Marie VERON